Irak : L’après-Rumsfeld a déjà commencé
Irak - Presque un mois après sa nomination à la tête du Pentagone, Robert Gates annonce déjà la couleur et commence à se démarquer de son illustre et tant controversé prédécesseur.
Et la tribune choisie pour afficher son programme n’est pas moins importante, la Commission des forces armées du Sénat.
Le contraste entre Donald Rumsfeld et son successeur Robert Gates était attendu à Washington mais pas à un tel point.
Les observateurs pensaient que la nouvelle équipe au Pentagone allait se contenter d’apporter des changements à la politique militaire en Irak, mais pas de remettre en cause la stratégie américaine au sujet de deux Etats pivots.
C’est pourtant dans cette direction que s’est prononcé hier le nouveau secrétaire américain à la Défense.
«Les conséquences d’un conflit militaire en Iran pourraient être tout à fait dramatiques», a déclaré hier devant cette commission Robert Gates.
Sans doute stupéfaits par cette déclaration inattendue, les membres de cette instance du Congrès ont voulu en savoir plus, ils seront servis.
Avertissant ses interlocuteurs sur la gravité d’une guerre avec l’Iran, Bob Gates défendra le même point de vue au sujet d’un autre pays paria pour les Etats-Unis, la Syrie. Il estimera à juste titre que le dialogue est une option à favoriser dans les relations avec ces deux pays. «Je crois qu’avoir un canal de communication avec ces gouvernements vaut la peine», poursuit-il. Jamais depuis l’élection de George W. Bush à la présidence des Etats-Unis en novembre 2000 le discours officiel n’avait changé à un tel point vis-à-vis de pays aussi bien haïs que craints à Washington.
Ancien président de l’université du Texas et proche parmi les proches du Président, le secrétaire à la Défense est bien conscient aujourd’hui qu’il est le fer de lance du changement de la stratégie américaine dans la région. Jadis vilipendés et objet de tous les lazzis, la Syrie et l’Iran redeviennent soudainement fréquentables aux yeux de l’administration américaine.
Et les raisons de ce changement sont bien connues. Vraisemblablement embourbé dans le piège irakien, George W. Bush s’aperçoit aujourd’hui que sa séparation de raison avec Donald Rumsfeld n’a pas suffi à apaiser les tensions en Irak.
La Commission spéciale indépendante présidée par l’ancien secrétaire d’Etat James Baker a préconisé hier des solutions afin de sortir de cette guerre meurtrière. Longtemps niées ou rejetées, les conséquences de ce conflit restent toujours douteuses et couvertes de contre-vérités. C’est ce que fera sans doute remarquer James Baker au président Bush.
Mais le désaveu est incontestable pour Washington. En plus de la situation chaotique en Irak et du changement de cap opéré d’urgence dans sa politique étrangère, l’administration américaine doit maintenant expliquer le départ de John Bolton.
Nommé au poste ultra sensible de représentant permanent des Etats-Unis à l’ONU, son choix n’a jamais été entériné par le Sénat. Le président américain avait pris cette décision en août 2005 alors que le Congrès était en congé annuel. Depuis la victoire du parti démocrate aux élections législatives de novembre dernier, le tonitruant ambassadeur Bolton savait bien que ses chances d’être confirmé dans ses fonctions étaient inexistantes. Un Sénat démocrate ne ferait jamais ce qu’a toujours refusé de faire un Sénat républicain.
Avec cette kyrielle de changements opérés aux Etats-Unis, c’est un aveu d’échec que semble laisser transparaître George W. Bush.
Accusé de toute part, honni par une opinion publique déçue par la tournure que prend la guerre en Irak, il doit à présent tenter l’impossible afin de terminer en douceur son second et ultime mandat à la Maison-Blanche. Le bureau ovale se prépare déjà à accueillir son successeur, et il ne sera certainement pas républicain.
Par Mohamed Khaled Drareni - La Tribune, le 7 décembre 2006.
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