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Medgaz : L'Algérie menace

Bouteflika et ZapateroLe Medgaz est-il compromis? Le gazoduc algéro-espagnol est au centre d’une tempête qui ne cesse de grandir, alimentée par les tensions énergétiques entre l’Algérie et l’Espagne.

Dernier épisode en date, le refus de Sonatrach des conditions espagnoles sur l’augmentation de sa part dans le capital du futur gazoduc sous-marin. En réponse, Sonatrach propose ou plutôt conditionne sa participation dans le gazoduc dont les travaux de construction commenceront fin 2007.

Hier, le ministre de l’Energie et des Mines Chakib Khelil est allé plus loin en agitant, en termes presque clairs, la menace d’un retrait de Sonatrach du Medgaz, synonyme de l’abandon du projet. Si les blocages venaient à persister, a-t-il dit, Sonatrach opterait pour l’alternative de la liquéfaction de son gaz pour le vendre sur d’autres marchés dans le monde, ce qui rendrait cependant le gazoduc Medgaz «économiquement peu rentable», a noté le ministre.

La conjoncture gazière joue en faveur de Sonatrach: le marché du GNL est en plein essor et l’Europe du Sud, l’Espagne en premier, n’a pas beaucoup de choix pour s’approvisionner en gaz dans un contexte marqué par les tensions énergétiques entre l’Europe et la Russie. Les spécialistes affirment, en effet, que l’Algérie restera le principal fournisseur de gaz pour l’Europe au moins durant les 20 prochaines années. Toutefois, la liquéfaction du gaz nécessite des investissements lourds. Et l’Espagne, géographiquement proche de nos côtes, constitue pratiquement la seule porte européenne pour le gaz algérien.

La seconde condition destinée à faire fléchir les Espagnols, Sonatrach ne contribuera financièrement au projet qu’à hauteur de 26% et non pas 36%, en attendant la décision de la commission nationale de l’énergie espagnole. «A chaque fois qu’il y a une demande de fonds, nous contribuerons à hauteur de 26%, ce qui représente des risques pouvant retarder l’achèvement du projet», a indiqué M. Khelil. Dans ce cas, qui va apporter les 10% restants pour financer la construction du Medgaz? Cette option faciliterait l’arrivée d’un autre actionnaire dans le Medgaz, probablement Gas Natural, mais cela donnerait aux compagnies espagnoles une majorité absolue dans le Medgaz, avec 62% de parts contre 26% pour Sonatrach.

La Commission européenne va-t-elle accepter une position dominante des compagnies espagnoles dans le gazoduc qui devra alimenter aussi la France et éventuellement d’autres pays européens? En tous cas, le ministre a tracé le chemin: Sonatrach s’en tiendra strictement à sa position de disposer de 36% des parts du projet de gazoduc Algérie-Espagne (Medgaz), au cas où la CNE refuse de lui augmenter -sans conditions- ses actions dans le projet. «Sonatrach a envoyé, hier, (vendredi) un recours à la CNE pour que celle-ci avalise les 10% des actions héritées par l’entreprise après le retrait de BP et Total» du projet, a déclaré M. Khelil. La CNE avait assorti tout accord de sa part pour augmenter les parts de Sonatrach de «conditions contraignantes», a rappelé le ministre.

Pour rappel, le gouvernement espagnol avait donné le 25 mai dernier son autorisation à l’exercice par l’entreprise nationale des hydrocarbures Sonatrach, des «droits de vote correspondant à sa participation additionnelle de 16%» dans le capital de la société Medgaz, pour la porter à 36%, tout en spécifiant les conditions auxquelles est soumise cette autorisation. Le conseil des ministres espagnol avait précisé que cette autorisation restera assujettie à l’accomplissement de certaines «conditions» par Sonatrach en tant qu’actionnaire, actuellement majoritaire à 36% . Chakib Khelil a relevé les contradictions espagnoles et dénoncé la discrimination pratiquée à l’encore de Sonatrach.

Selon le ministre, la CNE a, dans sa première décision, autorisé l’entreprise algérienne à ne commercialiser, directement sur le marché espagnol, qu’un milliard de m3 sur les 3 milliards qu’elle possède dans la société, et l’oblige de l’autre côté à ne pas descendre en dessous de 80% dans ses acheminements de gaz à travers le gazoduc (8 milliards de m3 par an). Pour le ministre, ceci est contraignant et «représente une contradiction dans les décisions de cette commission de régulation». La même commission, a-t-il relevé, a accordé, ces derniers jours, à Gaz de France (GDF) l’autorisation de distribuer son gaz en Espagne «sans la moindre restriction et sans même lui demander si elle possédait les parts de gaz qu’elle comptait commercialiser sur le sol espagnol».

Le ministre écarte le recours à l’arbitrage international et explique pourquoi le Medgaz s’est retrouvé pris en otage: «Initialement, il y a eu un certain nombre d’actionnaires dans le Medgaz. Deux actionnaires se sont retirés. Les actions de ces deux sociétés ont été redistribuées entre les actionnaires et Sonatrach a hérité de 10% de plus dans le capital. Si on n’avait que 9,99% de plus on n’aurait pas besoin de l’autorisation de la commission nationale de l’énergie hispanique et c’est ce que nous avons fait en adressant une demande d’autorisation», a déclaré Khelil.

Le ministre a avoué, hier, que si ces problèmes avaient été soulevés avant le lancement du projet, la construction du gazoduc serait retardée jusqu’à ce que le litige serait réglé. Concernant l’éventuel partenariat entre Gaz de France et Sonatrach, M. Khelil s’est limité à dire que l’Algérie recherche, à travers toutes les tractations qu’elle est en train de mener avec les entreprises étrangères, «un intérêt économique» et non pas politique.

Autrement dit, la question d’une alliance capitalistique entre la compagnie nationale des hydrocarbures et le géant gazier français sera traitée uniquement sur le plan économique. Mais, il est clair que la concrétisation de ce projet, évoquée par le nouveau président français Nicolas Sarkozy, lors de la campagne présidentielle, dépend beaucoup plus des relations politiques entre les deux pays.

Synthèse de l'article - Equipe Algerie-Monde.com
D'après le Quotidien Oran, Hamid Guemache et Z. Mehdaoui. Le 10 juin 2007.

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