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Etats-Unis : Et si Obama était élu ?!

cimentSur le net, dans les forums des chaînes de télévisions, sur les pages de magazines célèbres et, bien évidemment, sur les quotidiens de tous bords, une seule et même question revient sans cesse, dans des styles différents bien sûr et avec des mots à peine changés, pour ne pas trop choquer.

Cette question se rapporte au premier candidat de couleur qui prétend sérieusement à la présidence américaine. On demande aux internautes, aux lecteurs, aux auditeurs et aux téléspectateurs si Obama a vraiment des chances de l'emporter.

On lui demande s'il ne s'agit pas d'un tournant dans l'histoire de l'Amérique, si les Américains vont sérieusement élire ce fils de Kenyan, si l'Amérique d'Obama est celle qu'il faut dans la période actuelle... Des questions, presque anodines, qui disent long cependant sur la méfiance, voire la peur, de certains d'une victoire d'Obama sur son rival, l'ancien du Vietnam, le républicain Mac Cain.

En même temps que ce sondage qui se veut consciemment infini, une campagne est lancée pour invalider le jeune candidat noir. Son origine africaine est vite ressortie à coups de unes et de colonnes, voire de publireportages savamment dosés.

L'accent est bien mis sur cette origine qui rappelle l'esclavage et les esclaves noirs venus d'Afrique, ceux qui étaient longtemps considérés comme des sous-êtres et qui ont longuement servi les seigneurs blancs ! Une manière de rappeler aux gens de là-bas, au cas où ils auraient - qui sait ? - l'audace de voter pour quelqu'un dont le grand-père aurait pu faire partie de ces innombrables cargaisons humaines qui traversaient les mers et dont beaucoup crevaient en cours de route.

Mais comme si ce rappel ne suffisait pas, une certaine presse n'a eu cesse d'insister sur la séparation des parents de Barak encore enfant, à croire qu'ils furent les seuls époux à avoir rompu leurs relations dans une Amérique où tout peut durer sauf le mariage justement ! A cela, il faut ajouter le fait que son père était retourné dans son pays d'origine, le Kenya.

Ce retour au pays natal est présenté comme un abandon de famille de la part du père dont même la mort n'a pas été épargnée par des insinuations douteuses et trop pleines de sous-entendus. Parfois, on dit qu'il est mort une bouteille à la main, parfois, on raconte qu'il est mort dans la clandestinité... bref, tout ce qu'il faut pour donner l'image qu'il faut, ou plutôt qu'il ne faut pas, du père d'un candidat de couleur à la présidence des Etats-Unis d'Amérique.

Le thème est volontairement choisi car il vise à montrer l'enfance difficile du jeune candidat, ce qui ne rentre pas, du moins pas facilement, dans la perception que se font les Américains de leur président.

Ensuite, il y a la mère qui se remarie avec un asiatique, un autre étranger donc, et qui part vivre avec lui sous d'autres cieux. Un autre thème communicationnel tout aussi intéressant dans la mesure où il permet de mettre en avant une grande instabilité familiale, cet autre ingrédient de taille, visant à rendre l'ambition présidentielle d'Obama « naturellement incorrecte ». Mais de tous les éléments retenus dans cette campagne des plus sournoises visant à déstabiliser puis à disqualifier, aux yeux des Américains et du monde, le jeune démocrate, l'élément religieux est, sans doute, le plus important.

En effet, si une ambigüité a été volontairement entretenue quant à la religion du père de Barak Obama, sur la religion du second mari de sa mère, par contre, il n'y a aucune hésitation. Il est dit partout, en clair et en gros caractères, en titre même des magazines et en ouverture des émissions de prime time, que ce dernier était musulman. Musulman ?! Le juste mot pour qu'un travail de sape généralisé soit déclenché par tous et partout, à un moment où les confusions bizarres entre musulmans et terroristes, entre Islam et violence, entre Islam et danger sont délibérément entretenues par ceux-là mêmes qui n'ont eu cesse de hurler de colère à chaque sacrifice d'El-Aïd El-Adha et de se faire bizarrement silencieux devant les massacres d'humains en Irak, en Palestine, au Rwanda et qui, comme cela vient d'être révélé, protégeaient de dangereux criminels de guerre tels que Karadzic.

Dire que son beau-père était musulman était donc une carte de taille à tirer contre Obama car les « gens bien » ne tolèrent pas l'odeur de l'Islam et les Américains, en bons citoyens, réfléchiraient à deux fois avant d'opter pour un candidat qui peut avoir connu de si près un musulman. Et, comme pour pousser la chose encore plus loin, les détracteurs du jeune candidat, n'hésitent pas à nous ressortir que Barak Obama avait, à un moment de son enfance, fréquenté une école... islamique.

A nous, et aux citoyens américains d'abord, de faire les liens et, surtout, de faire la déduction qui s'impose : Barak Obama, et à défaut d'être lui-même musulman, ne peut qu'être un proche des musulmans. « Là, ça se corse ! » (comme le titre d'une émission d'une chaine française consacrée - oh la grande coïncidence ! - à la religion d'Obama). Ceux qui mènent cette campagne ne sont de toute évidence pas que des républicains qui cherchent à nuire à leur rival.

Il y a aussi ceux qui servent d'autres intérêts que ceux des Etats-Unis eux-mêmes. En réalité ce qui dérange dans Obama, tant pour les défenseurs du parti républicain en Amérique que pour les lobbies influents sur la scène politique américaine, ce n'est ni sa religion, ni son enfance, ni sa jeunesse incroyablement correcte malgré tous les problèmes qu'il a rencontrés, mais plutôt ce thème dont il a fait son leitmotiv et qui se rapporte au changement.

Un changement qu'il souhaite mener aussi bien sur le plan politique que sur ceux économique et social. Le changement en Amérique, et à ce niveau, portera inévitablement préjudice à certaines parties. Il dérangera sans doute des ordres établis et bousculera des socles profondément ancrés. Le changement que mènera Obama, s'il était élu, pourra tout simplement remettre en cause énormément de choses dont celles se rapportant aux relations internationales ne sont pas des moindres.

Quoi qu'on dise et quoi qu'on pense, Obama ne fait pas partie des va-t-en guerre pour une piqûre de moustique. Il fait plutôt partie de cette génération agacée par les conflits, l'usage de la force et le mépris des autres. Les Américains le savent et beaucoup d'entre eux espèrent ce changement. Barak Obama, bien que jeune, n'est pas novice et il a dû marquer un bémol sérieux dans son langage et dans son programme vers la fin de la précampagne, ce que les médias avaient présenté comme un « recentrage », un terme qui ne signifie généralement rien ! Son dernier discours en Amérique et son voyage en Israël montrent réellement à quel point il connaît les lieux et les règles des lieux.

Mais, du haut de sa jeunesse qui rappelle étrangement celle de J.F. Kennedy, du piédestal de son désir de changer quelque chose dans ce pays aux méthodes politiques vieillissantes et s'il est fortement convaincu qu'il lui appartient de souffler les premières brises de changement, Obama tentera certainement de faire bouger les choses.

Or, dans l'Amérique d'aujourd'hui, les changements majeurs porteront sévèrement atteinte à des intérêts bien connus et provoqueront sans doute des résistances puissantes. A défaut de passer, le changement rêvé d'Obama risque de... casser. C'est pourquoi, il semble probable que s'il est élu, et s'il tient sérieusement à aller de l'avant sur le chemin qu'il a promis à ceux qui le soutiennent, Obama risque de ne pas aller au bout de son premier mandat.

Synthèse de l'article - Equipe Algerie-Monde.com
D'après Le Quotidien d'Oran- par Aïssa HIRECHE Le 7 août 2008.

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