Algérie - À quand le poujadisme !
« Si tu donnes un poisson à un homme, il aura à manger pour la journée. Si tu lui apprends à pêcher, il aura à manger pour la vie ». (Proverbe chinois)
C'est le Ramadan. Le ministre de la Solidarité nationale vient d'annoncer que l'Etat algérien va consacrer aux familles pauvres et aux nécessiteux une somme estimée entre 2.2 et 3 milliards de dinars.
Comment reconnait-on une famille nécessiteuse ? Y a-t-il vraiment des critères ?
Une chose est sûre : cette année, il y aura forcément beaucoup d'argent pour tout le monde. Nous savons tous comment fonctionne l'ancien système. Les élections présidentielles sont proches et pour acheter le silence du peuple, tout est permis.
A l'affiche, l'inauguration des projets (inachevés !), une omniprésence des ministres qui veulent donner l'image d'un Etat soucieux du quotidien de ses citoyens.
Or, le peuple a tellement entendu la chanson, jusqu'à satiété, qu'il n'a plus besoin qu'on l'avertisse des magouilles du pouvoir. Je me suis aventuré à visiter le site internet officiel du ministère de l'Action sociale et de la Solidarité nationale pour les besoins de cet article.
J'ai un peu navigué entre les différents chapitres de ce dernier et à ma surprise, tout ce qui concerne les statistiques est vide.
Ce qui signifie, d'une part, que nous n'avons pas de statistique en ce qui concerne le nombre et la répartition des handicapés, de la population pauvre, ni des personnes âgées, ni des familles vivant en-dessous du seuil de pauvreté, etc. et d'autre part, qu'il n'existe pas de réelle politique de communication au niveau de ce ministère !
Pourtant, Monsieur le Ministre ne cesse de nous assommer par des discours positifs en insistant sur le fait que « Son Excellence le Président de La République » donne des instructions fermes pour répondre aux besoins des nécessiteux !
La gestion sociale en Algérie est catastrophique.
Depuis l'indépendance, rien n'a été fait d'une manière rationnelle et scientifique. Nos gouverneurs gèrent ce secteur archaïquement. Comment expliquer l'inexistence d'organismes qui s'occupent de tout ce qui est social, à l'instar de la Caisse d'Allocations Familiales (C.A.F.) en France ?
Nos gouverneurs attendent toujours qu'il y ait une catastrophe naturelle et des pertes humaines pour réagir, ce qui mène forcément à des décisions prises dans l'urgence et sans temps de recul. Ainsi, ils construisent n'importe quoi et n'importe comment, c'est du poujadisme !
Existe-t-il des assistantes sociales dans nos écoles, nos mairies, etc. Bref, où sont les assistantes sociales dans ce pays ? Que faire lorsqu'un élève est victime de malnutrition et de maltraitance au sein de son foyer ?
Quand vous avez à charge un enfant handicapé, que faut-il faire pour réclamer ses droits, et mettre en place une prise en charge physique, psychologique et matérielle ? Lorsque vous êtes face à des enfants victimes d'attouchements sexuels, d'inceste, que faire ?
Comment aider les mères célibataires, les sans domicile fixe, les personnes âgées ? À qui s'adresser pour obtenir un logement quand on a des ressources financières insuffisantes ? Et tant d'autres questions... Faut-il faire appel à notre super-ministre pour remédier à ces situations et obtenir quelque aumône ? Ou faut-il interpeler des associations qui ne disposent que d'un petit local ?
Ces associations, qui travaillent dans la discrétion sont certes, animées d'une volonté évidente, mais fonctionnent sans encadrement. Alors que certaines attendent désespérément des budgets qui arrivent au compte-goutte pour fonctionner normalement, d'autres n'attendent ces budgets que pour remplir leurs poches, comme l'ont toujours fait leurs aînés !
Sans oublier les associations qui servent de façade pour le pouvoir en place.
Concernant le domaine de la formation, nous avons tant besoin d'un institut pour former des travailleurs sociaux (assistantes sociales et des agents sociaux) !
Il est anormal que la commune n'arrive guère à recenser toutes les catégories sociales de son territoire et à les chiffrer au niveau national.
C'est à ce niveau que les autorités doivent agir pour encadrer, former, organiser et aider. Le rôle des associations constituent une forme de contre-pouvoir, car elles ont capacité latente de faire émerger les populations ignorées, oubliées, et de proposer par la suite une aide efficace pour sortir ces populations de leur misère. Cependant, il n'appartient pas aux seules associations de les prendre en charge.
La véritable urgence, c'est de créer une structure nationale dotée de moyens humains et réglementée par la Constitution. Certes, on n'est jamais à l'abri de toute menace ni de toute forme d'exclusion sociale (chômage, pauvreté, handicap, vieillissement, etc.).
Car elles existent et existeront toujours. Cependant, pour que les problèmes sociaux ne soient plus gérés uniquement dans l'urgence, cette institution nationale ne doit pas seulement prendre en charge les personnes en difficulté, elle doit aussi anticiper ces difficultés.
Pour ce faire, elle doit pouvoir disposer de budgets réguliers et (adéquats) aux besoins de la population. Elle doit aussi être rattachée à un bloc de recherche (université ou institut nationale) pour établir des études statistiques fiables qui serviront à la mise en place de solutions pertinentes.
Dans un Etat moderne, l'arbitraire, les solutions de dernière minute et le sentimentalisme n'ont pas de droit de citée devant la rationalité, l'organisation, la prévention, la planification, etc.
Messieurs les Députés, au travail !
Synthèse de l'article - Equipe Algerie-Monde.com
D'apres Le Quotidien d'Oran. Par Yazid Haddar. Le 22 Septembre 2008.
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