Algérie - Ouyahia à propos des sinistrés de Ghardaïa : «La promesse de relogement, avant la fin de l'année, sera tenue»
Le chef du gouvernement est revenu, hier, sur le déluge qui a endeuillé Ghardaïa, tout en avouant qu'il y a anarchie dans les schémas urbanistiques et en appeler à la conscience du peuple pour respecter les normes et les règles en matière de construction à travers l'ensemble du pays.
C'est dans le cadre de la rencontre hebdomadaire du ministre de la Communication avec la presse que le chef du gouvernement a tenu à revenir sur la catastrophe naturelle à Ghardaïa.
«Je ne suis pas venu faire une conférence de presse, le jour où je voudrais la faire, je vous en informerai, donc, je ne répondrai qu'aux questions relatives à ce qui s'est passé à Ghardaïa,» avait-il prévenu tout au début de son intervention.
Ahmed Ouyahia fera le point sur les effets désastreux de la catastrophe naturelle qui a emporté une grande partie des terres de Ghardaïa, ses habitations et ses infrastructures avec tout ce qu'elles abritent comme vies humaines et animales.
Ouyahia a reconnu qu'il est normal que les habitants de cette région soient en colère, mais a-t-il dit «j'ai eu l'occasion de rencontrer les notables de la ville qui d'abord s'en remettent à Dieu, ensuite Cheikh Abdelhamid, un des notables qui dépasse les 80 ans d'âge, a reconnu que Ghardaïa n'a pas vu ça depuis 80 ans.»
Ceci pour indiquer que la fatalité y est pour quelque chose, surtout que le déluge a mis, dit-il, des quartiers sous trois mètres et plus d'eau.» Mais le chef du gouvernement n'en reste pas là. «A partir du moment où il y a mort d'hommes, il y a une information judiciaire qui est déclenchée,» a-t-il affirmé en réponse à une question sur la suite à donner à la plainte que les notables ghardaouis ont dit avoir déposer contre X.
Qu'en est-il de l'anarchie dans les schémas urbanistiques? «Oui, elle existe,» a-t-il affirmé en lançant «ça vous étonne qu'un chef de gouvernement reconnaît ça!» Il rappelle le terrifiant tremblement de terre qui a secoué El-Asnam, en 1980, pour dire qu'«on doit exploiter la blessure pour ne pas oublier.» Il revient sur le déluge à Ghardaïa pour indiquer «comme on dit chez nous, l'oued a délimité son champ naturel.» Ne pas construire dans les lits d'oued et respecter les normes urbanistiques, Ouyahia estime que ce n'est pas une affaire de l'Etat, tout seul, mais «ça appelle toutes les consciences.»
Parce que, a-t-il tenu à faire remarquer «si la loi l'interdit, j'aimerais bien que notre peuple ne nous coupe pas la route avec des pierres et des troncs d'arbres quand on viendra le lui dire.» Il renchérit «j'accepte que la population ne soit pas d'accord sur une taxe ou une réglementation quelconque mais une réglementation qui protège les vies, je ne pense pas qu'elle la rejette.»
Il en appelle aux médias «la radio qui est un service que je commande, pour contribuer à la sensibilisation des populations sur ces questions.»
«On a beaucoup de retard»
A propos des mesures de protection en cas de fortes crues dans d'autres régions, Ouyahia répondra que «oui, elles ont été prises mais sont-elles suffisantes? Certainement pas».
Entre autres mesures «la digue à Ghardaïa, le barrage qui a été construit et qui a fait éviter à la ville que les conséquences du déluge ne s'aggravent davantage.» Il rappelle qu'en tant que chef du gouvernement «j'ai eu un budget d'équipements de 300 milliards de dinars, aujourd'hui, il est à 500 milliards DA.
Ceci ne m'empêche pas de reconnaître, qu'on accuse beaucoup de retard dans ce domaine.» Il précisera encore «ce serait mentir de dire que nous sommes à l'abri de catastrophes.» Parenthèse, Ahmed Ouyahia s'est rendu compte à un moment qu'il faisait trop chaud dans la salle.
«Yaâtikoum essaha pour l'éclairage, nous sommes au mois d'octobre mais il fait encore chaud, si vous me l'aviez dit, je serais venu en tricot de peau.»
Interrogé sur l'existence ou non de structures organisées d'intervention en cas de catastrophes, il dira «bien sûr qu'il y a des structures d'intervention mais vous savez qu'au-delà d'un certain niveau, elles ne peuvent pas grand-chose.
Même les Etats-Unis n'ont pas les moyens de faire face à un cyclone force 5!» Il prendra aussi l'exemple «des Chinois lorsqu'ils ont eu un tremblement de terre de magnitude 7, ils étaient comme nous avec la pelle et la pioche à la main.» Il avoue cependant que «nous avons des insuffisances en comparaison avec les moyens modernes existants à travers le monde mais nos moyens militaires et ceux de la protection civile (1.000 hommes à Ghardaïa) sont importants.»
Pour plus de précision, le chef du gouvernement explique qu'«en ce qui concerne les petites pompes, c'était un problème à Ghardaïa, les rues étant étroites, on ne pouvait pas intervenir avec les camions-citernes, il y a des défaillances, certes. En terme de dégagement, nous avons du travail, en terme de complication, au niveau de la palmeraie, je ne la vois pas terminée jusqu'à la fin de la semaine minimum.»
«On n'est pas loin des six mois à venir...»
En réponse à une question sur les prévisions faites par le CNES sur les catastrophes qui risquent de survenir dans certaines villes, Ouyahia répondra «avec tous mes respects au CNES, il y a plusieurs autres organismes qui ont fait de meilleurs rapports sur ce thème, on a Guelma, Oran, Souk Ahras, toutes ces villes sont des bombes. Si vous me parlez des mesures de prévention simples comme la construction de digues ou le drainage des eaux, oui, on le fait mais quand il s'agit de mesures plus importantes, c'est du développement stratégique, on sait tous que 90% de la population vivent sur 1.200 km du Nord, il faut aérer le pays.» Mais mon frère, dira-t-il au journaliste «on ne déplace pas un peuple en un jour.»
Autre référence aux Etats-Unis, «la Californie, l'Etat du Nevada, c'est une société qui bouge. Chez nous, on ne peut pas bouger tout seuls, si les mentalités ne bougent pas.» Il rassure pour ce qui est des études des sols «elles se font» même s'il ajoute un «mais pas assez». Il note que «nous avons même revu le seuil des pics sismiques, Alger est passé de 3 à 4.»
Seulement, il affirme «face aux catastrophes naturelles, il n'y a jamais de mesures immédiates.»
L'enveloppe débloquée pour faire face aux effets du déluge sur Ghardaïa pourrait augmenter selon les besoins. «J'ai dit que ce sera 20 milliards de dinars, ça pourrait être 15 comme, ça pourrait être 30, ce qui est sûr, c'est qu'aucun secteur n'a des problèmes d'argent, ils doivent préparer des dossiers qu'on budgétise dès qu'ils sont ficelés. Tout doit être finalisé avant la fin du mois.» Le chef du gouvernement évalue les dégâts en infrastructures à 5 milliards DA.
Par ailleurs, il persiste et signe au sujet de «la promesse de reloger les Ghardaouis avant la fin de l'année, elle sera tenue, quand je l'avais faite, j'avais sous la main 700 logements et j'ai aujourd'hui un minimum de 2.000, ce qui me fait 2.700 logements, d'ici à la fin de l'année, on réglera le problème.»
Il vantera pour cela les mérites des sociétés algériennes spécialisées dans la construction du logement en préfabriqué.
Contracter une assurance en Algérie n'est pas une évidence pour les citoyens. Ouyahia en explique les raisons «l'Etat ne peut pas laisser les sinistrés dehors, l'Algérien n'est pas en mesure de l'admettre, il est donc obligé de les prendre en charge et les indemniser parce que face à une catastrophe sociale, on ne peut pas appliquer une logique économique. En attendant que les choses changent. Il y a une mutation culturelle, économique qui doit s'accomplir dans notre pays, il faut le sensibiliser.»
Si l'Etat algérien a refusé les aides de pays étrangers c'est parce que dit Ouyahia «l'Algérie ne mendie pas, elle a les moyens pour les secours, parce que je sais qu'il y a des croque-morts dans ce pays qui à chaque fois qu'il y a une catastrophe, ils pensent que le pays est tombé dans un gouffre.» A propos des spéculations sur le nombre de victimes, il lancera, avec en filigrane, une grande insinuation: «il y a des Sniaïia, on n'est pas loin des six mois à venir, chacun allumera son «kanoun» comme il voudra avec ce qu'il voudra mettre dedans.»
Synthèse de l'article - Equipe Algerie-Monde.com
D'apres Le Quotidien d'Oran. Par Ghania Oukazi. Le 8 octobre 2008.
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