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Algérie - Pourquoi ont-ils sifflé la Marseillaise ?

Marseillaise La vitesse et la manière avec lesquelles président et gouvernement français ont réagi au comportement des spectateurs tunisiens au Stade de France, ce mardi 15 octobre, ont suscité beaucoup de questions et autant de critiques tant dans la presse que chez les personnalités politiques.

En effet, et s'il est tout à fait entendu que le fait de siffler un hymne national, ici ou ailleurs, constitue un comportement en tout point condamnable, il n'en demeure pas moins que cet acte doit être considéré en tant que comportement de spectateurs, ni plus ni moins, c'est-à-dire comme tous ces actes qui vont de la liesse suite à des qualifications ou des couronnements (Paris et la France entière en 1998, par exemple), jusqu'aux envahissements de terrain ou à la violence à la sortie des stades, et les exemples ne se comptent plus dans ce cas.

Si les phénomènes de foules, quoi qu'on en dise, méritent d'être compris car ils constituent toujours une forme de manifestation par laquelle une société, dans son ensemble ou en partie, émet, le plus souvent inconsciemment, des signaux aux décideurs, ces phénomènes sont encore à prendre avec plus de sérieux lorsqu'ils deviennent répétitifs.

Or, dans le cas qui nous intéresse, ce phénomène, qui s'est produit en 2001 (match France-Algérie) et en 2007 (France-Maroc), n'a pas manqué de se reproduire ce 15 octobre 2008, au même stade, à l'occasion du match France-Tunisie. Comme qui dirait « jamais deux sans trois » !

Les tours de la statistique Pour le président et le gouvernement français, les statistiques sont, on ne peut plus, claires et significatives. Autrement dit, en interrogeant leurs bases de données, ils se sont rendu compte que, à chaque fois, il s'agit d'un match amical contre un pays maghrébin et au Stade de France.

Sur trois observations, nous avons trois vérifications du phénomène. Et comme une probabilité de 100% équivaut à une certitude, la conclusion consistant à lier les trois éléments (nature du match, appartenance du pays et lieu de la rencontre) n'a pas tardé à être tirée : « A chaque fois qu'un match amical est organisé avec un pays du Maghreb au Stade de France, c'est la pagaille ! », semblent nous dire ministres et autres responsables en charge de la question.

C'est gênant de le dire, mais tenir ce genre de raisonnement superficiel, dans un pays comme la France, au troisième millénaire, c'est tellement surprenant qu'on ne trouve presque plus l'envie de réagir. Est-ce possible ? Tenir un tel discours, c'est comme si, après avoir remarqué que chaque été les ventes de lunettes de soleil augmentent, la demande de desserts glacés explose et les places sur les vols entre Alger et Paris se font rares, on en tirerait la conclusion (ô combien savante !!!) que, « à chaque fois que la vente des lunettes de soleil et des desserts glacés augmentent, on ne trouve plus de place sur les vols Alger-Paris ».

Sincèrement, on attendait mieux, beaucoup mieux ! On comprend pourquoi, s'appuyant sur ce raisonnement, M. Laporte a proposé tout simplement de ne plus jouer contre ces pays de matches amicaux au stade de France, comme si l'Algérie, la Tunisie ou le Maroc ont d'autres types de rencontres à jouer contre la France à Saint Denis. Il a aussi proposé de faire jouer ces matches en province, « où, ajoute-t-il, l'ambiance est plus conviviale », comme si les jeunes Parisiens d'origine maghrébine différaient de leurs confrères de la province ou d'ailleurs en France. Drôles de choses que peuvent faire faire les statistiques ! D'ailleurs, vouloir faire jouer les équipes maghrébines ailleurs qu'à Paris signifie qu'on les sanctionne à cause du comportement de jeunes... Français.

D'origine maghrébine, oui, mais des Français, ne l'oublions pas ! Comme quoi ne réfléchir qu'en fonction de la statistique peut jouer des tours ou, si l'on veut, tout n'est pas question de chiffres. Et si c'était autre chose ? Au lieu de s'empresser de tirer des conclusions de la sorte, les autorités concernées auraient dû essayer d'abord de comprendre car ce n'est que lorsqu'on comprend un phénomène qu'on peut, sinon le maîtriser, du moins en diminuer l'ampleur. A quoi est dû le comportement consistant à siffler un hymne national ? Sans chercher aucunement à justifier un tel acte qui demeure, ainsi que nous l'avons précisé dès le départ, condamnable en soi, il appartient aux autorités compétentes de chercher à décrypter le message qu'il comporte.

Certains responsables, sans avoir eu besoin de trop réfléchir, ont vu une réaction par rapport au passé colonial, comme quoi ces jeunes ont sifflé la Marseillaise à cause de ce qu'elle comporte de souvenirs guerriers et coloniaux d'une nation qui refuse jusqu'à présent de demander pardon alors que, comble de paradoxe, elle ne cesse de réclamer à la Turquie, par exemple, de reconnaître ses torts dans l'histoire face à l'Arménie !

Peut-être, mais dans ce cas, faut-il blâmer des jeunes qui, excités comme tous les jeunes du monde à l'ouverture d'un grand match de football, ne contrôlent plus leurs actes (et l'on en a vus !), ou bien faut-il secouer cette mémoire défaillante d'un Etat qui ne regarde que du côté qu'il veut, quand il veut encore. Et à quoi nous avancerait, dans ce cas, la solution consistant à faire jouer la rencontre contre les anciennes colonies du Maghreb à Marseille, à Mont-Saint-Martin, à Roquefort-les-Pins ou à Fréjus ? Il se trouvera toujours quelques gamins qui continueront à siffler le passé de la France dans leurs pays respectifs, quel que soit le stade et indifféremment de la ville.

D'autres ont vu dans le comportement manifesté ce mardi, un acte qui prend sa source dans les évènements de la banlieue. Peut-être ! Oui, peut-être qu'une rencontre de football peut servir de cadre propice à l'expression d'un sentiment de frustration sans avoir, grâce à la foule si nombreuse, à être conduit au commissariat le plus proche ou à être brutalement traité de «racaille». Qui sait ? Et si cela n'a rien à voir avec toutes ces suppositions ? Si c'était seulement une mauvaise manière de manifester son mécontentement à l'égard d'un mépris, d'un oubli, d'une marginalisation... ?

Qui sait ? Et si c'était autre chose ? Comme une manière, enfantine et innocente, qu'auraient trouvée ces spectateurs pour manifester simplement leur présence, sans aucun fond de haine ou de méchanceté ? Qui sait ? Quelle que soit la raison que l'on pourrait invoquer, on finira toujours par s'apercevoir que la réaction officielle française a été démesurée par rapport à l'incident.

Synthèse de l'article - Equipe Algerie-Monde.com

D'apres Le Quotidien d'Oran. Par Aïssa Hirèche . Le 18 octobre 2008.

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