Algérie - Quelques jours après l'assassinat d'un enseignant à Mostaganem: Les langues se délient
La communauté universitaire de la ville de Mostaganem n'a pas encore fait son deuil, suite à l'assassinat d'un de ses membres au sein même du campus universitaire. Lors de l'AG, organisée dans la matinée de mardi, le désarroi et la consternation étaient perceptibles sur tous les visages.
Le Professeur Zarhouni, un des proches de feu Mohamed Ben Chehida peinait à trouver ses mots. « C'est terrible, à huit heures du matin, il était dans son bureau et à quatre heures de l'après-midi du même jour, il se retrouve sous terre ».
Et d'évoquer sa fillette de quatre ans à qui on a fait croire que son père se trouve en France. « Jusqu'à quand va-t-on lui cacher la vérité ? », s'interroge-t-il. Par pudeur, certains intervenants lors de cette AG, notamment des femmes, ont réprimé des sanglots.
Mais en dehors de ce sentiment commun, l'assistance a été partagée.
Les moins nombreux, maîtrisant leurs ressentiments, prônaient des attitudes conciliantes. L'un d'eux, se réclamant en tant que proche collaborateur du défunt, invitera ses collègues à reprendre langue avec les étudiants et à cesser le mouvement de protestation.
En tout cas, il les a prévenus qu'un fossé est en train de s'ériger entre les étudiants d'une part et le collectif des enseignants d'autre part. Contrairement à lui, d'autres refusent même de songer à des circonstances atténuantes à accorder à l'étudiant, auteur présumé du meurtre.
« C'est un assassin. Il n'y a pas d'autres noms pour le qualifier », tonna une enseignante. D'ailleurs, il y a un bras de fer qui se profile entre les étudiants et les enseignants. Les deux clans décident de se mobiliser le jour du procès en se regroupant devant le tribunal pour faire pression.
Mais cette volonté de revanche, lourdement affichée, s'explique par un fait difficile à gérer et assumer.
La communauté universitaire de Mostaganem, et partant de tout le pays, a reçu de plein fouet son image, peu reluisante, au sein de la société. Des intervenants lors de cette AG ont évoqué quelques-unes des perceptions des plus prégnantes de l'enseignant et de l'université auprès de monsieur tout le monde. Soulevant la question du commerce des notes, sans le dire ouvertement, un chef de département dira : « à la fin du semestre, j'ai recensé 97 étudiants qui ont pu décrocher leur année scolaire.
A la rentrée, je me retrouve avec plus de 200 ». Mais, concernant le meurtre de leur collègue, sauvagement assassiné, plusieurs enseignants n'arrivent pas à s'expliquer les lectures données à ce crime par de simples citoyens. Ce qui a fait dire à l'un d'eux : « il faut engager une campagne d'information au niveau du large public ». Précisons qu'à aucun moment, l'aura et la mémoire du défunt n'ont été écornées.
Au contraire, un de ses proches et collègues soulignera qu'il comptait parmi ses relations professionnelles un physicien prix Nobel de nationalité française.
Une autre question fondamentale a été effleurée lors de cette AG sans être vraiment approfondie.
Intervenant juste après la prise de parole d'un représentant du Cnapest venu témoigner ses sympathies aux enseignants, un enseignant invitera ce syndicaliste à s'exprimer « sur la violence régnante dans les écoles, les CEM et les lycées et que nous héritons en fin de parcours nous à l'université ».
Malheureusement, la proposition est restée sans suite. Parmi les décisions prises lors de cette AG, relevons celle de l'attribution du grade de Docteur honoris causa à feu Benchehida.
D'autre part, les travailleurs des résidences universitaires de Mostaganem ont décidé d'observer un gel de leur activité par solidarité avec le corps enseignant et en signe de protestation contre ce crime. Mais le véritable risque auquel il faut faire attention est l'approfondissement du clivage entre enseignants et étudiants.
Certains sont conscients de ce danger...
A noter qu'au niveau de plusieurs universités, des enseignants se sont solidarisés avec leurs collègues de l'université de Mostaganem. A Béjaïa, un rassemblement a été organisé mardi. «Je suis encore sous le choc. Un étudiant avec un couteau à l'intérieur de l'université, c'est déjà grave et inadmissible.
Y recourir pour tuer, ça dépasse l'entendement», a indiqué une enseignante.
A Mascara, les enseignants universitaires réunis en AG, lundi, se sont inquiétés de la généralisation et de la banalisation de toutes les formes d'agression sur les enseignants à l'intérieur même de l'enceinte universitaire, selon un communiqué du CNES.
A Chlef, les enseignants de l'université Hassiba Ben Bouali, réunis lundi, ont décidé d'un arrêt de travail de trois jours, appelant les parties concernées à prendre les mesures qui s'imposent contre la violence à l'université.
Synthèse de l'article - Equipe Algerie-Monde.com
D'apres Le Quotidien d'Oran. www.lequotidien-oran.com. Par Ziad Salah . Le 23 octobre 2008.
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