Algérie - A un mois de l'Aïd: La fièvre du mouton s'empare des marchés
Après la «ruine» du mois de Ramadan, suivie une encablure plus loin de l'autre «essorage» de la rentrée scolaire, voici venu le tour du dilemme des fêtes de l'Aïd El-Kebir et le terrible... coup de corne qu'il risque, encore une fois, de porter au portefeuille de la ménagère tiaretie.
Cette année encore, si le cheptel est abondant, les prix du mouton n'ont pas attendu la dernière ligne, pour prendre l'ascenseur et entraîner dans leur sillage le prix de la viande au détail, qui atteint des pics inégalés depuis plusieurs mois.
Hier, au marché couvert de Tiaret, le mouton narguait du haut de ses 700 DA le kilogramme, le commun des citoyens qui finit par «rendre gorge» devant une vie devenue si chère que «j'ai vu de mes propres yeux des gens pleurer à chaudes larmes de peur de rentrer chez eux les mains vides», jure Khaled, un légumier rencontré au marché couvert, qui nous dit ne pas avoir avalé un» traître» morceau de viande de «ghalmi» depuis le mois de Ramadan dernier.
«C'est pourquoi, nous décoche-t-il en pleine figure, j'ai décidé de faire l'impasse cette année sur un mouton qui n'est plus de nos jours qu'un moyen de frimer et d'afficher un laxe osentatoire pour les parvenus», se hassarde-t-il à débiter devant le regard «exorbité» de ses voisins commerçants, plantés juste en face de lui.
Parce qu'à pratiquement un mois de la fête de tous les soucis, il faut dire que pour une mauvaise nouvelle, c'en est vraiment une pour la pauvre ménagère tiaretie.
Ces derniers jours, sur les étals des bouchers au marché couvert de la ville, (véritable baromètre des prix des viandes mais aussi des fruits et légumes), le prix du kilogramme de viande ovine affichait sept cents dinars le kilogramme, un record absolu depuis plus d'une année. Et selon des bouchers que nous avons interrogés hier, le prix des viandes rouges devrait prendre l'ascenseur dès le week-end prochain, pour flirter avec les 800 DA le kilo, voire plus pour l'ovin, prédisent-ils.
Pourtant, nous explique cet autre boucher, «rien ne laisse présager une telle flambée avec les prix très bas de ces dernières semaines, puisqu'un antenais de vingt kilogrammes était cédé, il y a à peine un mois, à moins de dix mille dinars la tête», s'intrigue-t-il, même si, ajoute-t-il en bon connaisseur des arcanes des marchés à bestiaux, la période des fêtes de l'Aïd El-Adha, correspondant toujours avec la saison du grand pèlerinage, est toujours un «intermède» annuel où les prix des viandes flambent sans crier gare.
Pour d'autres spécialistes du monde de l'agriculture, le renchérissement rédhibitoire de l'aliment de bétail et la maladie de la blue tongue ou fièvre catarrhale, qui a frappé le cheptel, a contraint les éleveurs à engager beaucoup de frais pour espérer le récupérer, une fois venues les fêtes de l'Aïd El-Kebir.
Lundi dernier, au marché à bestiaux de sougueur, véritable plaque tournante du commerce des viandes rouges, les éleveurs et autres maquignons se frottaient déjà les mains au vu de la perspective «heureuse» d'amortir les frais insupportables qu'ils ont subis tout au long de la saison agricole, plus que mauvaise cette année. En effet, scénario classique, la mauvaise saison agricole a eu des retombées catastrophique sur les éleveurs, qui ont pâti du renchérissement de l'aliment de bétail qui se répercute ensuite inévitablement sur le prix des moutons.
«Au rythme où vont les choses, il y a un grand risque d'abandon total de la filière de l'élevage ovin, avec des retombées inimaginables que cela pourrait engendrer sur toute l'éocnomie locale et même nationale», averti cet éleveur de la région de Aïn Dheb, une localité réputée pour être un réservoir à mouton parmi les plus importants de toute la région du Sersou.
D'autres éleveurs de la région de Rechaïga, à l'est de la wilaya, ont expliqué avoir tout le mal du monde à endiguer la maladie de la blue tongue, certains n'ayant même pas pris la peine de procéder à la démoustication des étables et autres enclos, vu la cherté des produits et le manque de maîtrise d'une technique peu maîtrisée par les éleveurs.
Les services vétérinaires avaient d'ailleurs appelés, il y a quelques semaines, à un confinement des ovins et même des bovins pour éviter la déclaration d'autres maladies dites «émergentes» et lutter ainsi contre une contamination à large échelle des cheptels, dans une wilaya qui s'enorgueillit de compter jusqu'à un million cinq cent mille ovins et plus de soixante-dix mille bovins.
Dans une région qui entretient la réputation un peu surfaite d'une ville où l'on peut consommer la viande la moins chère du pays, le citoyen risque, encore une fois, de tomber dans le panneau des tricheurs qui tentent, non sans un certain succès, de «fourrer» des ovins engraissés à base d'aliments de volaille à un consommateur qui a les yeux plus grands que le ventre.
La bête a tendance, en effet, à prendre du poids très vite (ce qui fait l'affaire des maquignons) tout en dégageant une odeur tenace de poulet. Alors, les consommateurs sont encore une fois appelés à déjouer la «combine». Même si le prix du poulet a gagné, lui aussi, du galon pour être cédé hier à 290 DA le kilogramme, contre 280 dinars pour la dinde et la somme astronomique de 200 dinars pour la l'innommable» sardine !
Synthèse de l'article - Equipe Algerie-Monde.com
D'apres Le Quotidien d'Oran. www.quotidien-oran.com. Par El Houari Dilmi. Le 11 Novembre 2008.