Algérie - Communication: Le choix des hommes
Le remplacement du directeur général de la Télévision nationale par un cadre du secrétariat d'Etat, chargé de la Communication, vient confirmer que le choix des Hommes peut se faire, au gré des humeurs et autres conjonctures très particulières.
Hamraoui Habib Chawki, un nom qui a longtemps rimé avec le poids du patrimoine audiovisuel national, vient d'être écarté de la Télévision nationale.
Il en a été le patron pendant près de dix ans, le temps de deux mandats présidentiels de Bouteflika. Son nom ou plutôt ses initiales sont devenues presque un logo du paysage audiovisuel de l'Algérie indépendante. HHC a ainsi beaucoup grandi sous des auspices d'une République qui lui ont été très favorables.
Jeune, il a été deux fois ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement tout en étant membre du parti du pouvoir, le RND d'Ahmed Ouyahia. Moins jeune, il avait été un des clous de l'UNJA, une des organisations satellites du FLN. C'est dire que sa promiscuité avec Abderrachid Boukerzaza, le ministre limogé la semaine dernière, ne date pas de l'ère Bouteflika. Le hasard a fait que les deux hommes soient remerciés pratiquement à la même période. La comparaison s'arrête là. Cependant, HHC tout autant que Boukerzaza pourraient rester « en réserve de la République ». Comme le premier pourrait déjà être placé ailleurs le plus rapidement possible.
Il faut reconnaître que HHC n'est pas né de la dernière pluie. Il a su naviguer - terme à la mode - comme il se doit dans les courants d'un système politique qui repêche ses hommes non parce qu'ils ont appris à travailler, mais parce qu'ils ont bien compris le jeu des tablettes auquel ils s'adonnent pour perdurer.
Ceci étant dit, ce n'est pas tant la personne de HHC qui oblige à ces rappels d'exercice du pouvoir, mais plutôt celle de celui qui l'a remplacé à la tête de la Télévision nationale. Le recours à l'histoire récente s'impose à cet effet.
A ceux qui ont oublié, Abdelkader El-Eulmi, le nouveau directeur général de l'ENTV, a déjà occupé ce même poste au temps du Président Liamine Zeroual. En 1999, et après l'élection de Bouteflika à la présidence de la République, El-Eulmi l'était encore. Jusqu'au jour où le Président Bouteflika entame une visite d'Etat à la somptueuse Principauté de Monaco. Au dîner, que le président avait offert au Prince de Monaco, la télévision algérienne avait projeté longtemps sa caméra sur le fameux Troudi, l'homme d'affaires qui avait de grosses démêlées avec la justice pour une histoire de tomates et de... dette russe. Ce gros plan avait été pris mal à propos.
La presse algérienne s'en était saisie le lendemain pour rapporter que le dîner de la présidence de la République algérienne, offert dans la Principauté de Monaco, avait été financé par le richissime Troudi. Branle-bas de combat, colère dans le microcosme du président qui se terminera en évidence par une sévère prise de sanction. Selon des indiscrétions, c'est à sa descente d'avion, sur le tarmac de l'aéroport d'Alger, que Bouteflika avait ordonné le limogeage de Abdelkader El-Eulmi, alors DG de l'ENTV, celui qu'il avait tenu comme responsable de ce qu'il pensait avoir été un scandale.
Benaâmar Zerhouni, alors ministre de la Communication, a été chargé de trouver un remplaçant à El-Eulmi.
Il avait proposé Abdelmadjid Chikhi, un de ses cadres de son cabinet, actuellement chargé des archives. Entre-temps, l'organisateur des grands galas en Algérie avait invité Warda El Djazaïria pour un concert à Alger. Connu pour être un fan de Warda, Bouteflika avait assisté au show avec beaucoup de plaisir.
A l'époque, HHC faisait, pour certains, sa traversée du désert. Pour d'autres, il était en réserve de la République.
C'est, dit-on, Warda qui avait intercédé en sa faveur auprès du président de la République. Il devient alors DG de l'ENTV, en remplacement de Chikhi, qui ne l'avait été que pendant... 11 jours.
C'est dire que le choix des hommes se fait parfois bien loin des critères de compétence ou de crédibilité. Le pouvoir politique s'est bien accommodé de responsables avec, comme seul bagage, le maniement de la flûte, l'encre du taleb et même un plateau de thé posé avec doigté sur la tête d'un danseur du ventre...
Synthèse de l'article - Equipe Algerie-Monde.com
D'apres Le Quotidien d'Oran. www.lequotidien-oran.com. Par Ghania Oukazi. Le 20 Novembre 2008.