Schumacher, les larmes en moins

Une légende s’apprête à tirer sa révérence. A entrer définitivement dans la postérité. Et par quelle porte ! En annonçant dimanche sa retraite, Michael Schumacher n’a pas tardé à entraîner la pluie de louanges prévue dès lors que «l’événement» était programmé, la fin d’une immense carrière dans l’air les heures précédant un Grand Prix mythique et chargé de symboles pour un coureur ne ressemblant à aucune autre icône.

Dont les exploits vont bien au-delà du sport, selon la réaction d’un des dirigeants les plus en vue dans son pays qui, au même titre que de nombreux observateurs, n’a pas tari d’éloges à l’endroit de cet homme de «glace» né pour gagner des titres, écraser de son aura l’un des sports les plus pénibles de la planète.

Une grande personnalité, un véritable monstre des podiums qui s’en va. Normal qu’on lui tisse les lauriers dus à son auguste rang, à son palmarès inégalé et sûrement inégalable.

De quoi sera fait l’après–Schumacher dans une Formule Un, un monde à part, qui dérange forcément pour toutes les questions qu’il soulève ? Une nouvelle étoile est née et s’apprête à prendre une place de choix dans une comète-F1 qui a ses propres règles et peut-être des normes loin de l’image traditionnelle que l’on se fait de la performance sportive.

L’Espagnol Fernnado Alonso, jeune, beau et ambitieux comme seule la discipline en permet et enfante généralement dans la douleur, a pris une décisive option pour combler le vide que laissera un collectionneur de titres, une machine à affoler les chronos et dont la popularité, la grandeur n’auront finalement jamais été à la hauteur de ses exploits. Des lauriers et des comparaisons inévitables.

Comme il en pleuvait. A l’image de cette sentence sans complaisance prononcée à l’endroit de celui qui restera indéniablement comme le plus grand pilote de tous les temps. Sur le seul plan statistique. Uniquement. Donc aussi froidement que le permet le langage des chiffres, Schumi (pour les intimes) n’ayant jamais pu conquérir les cœurs.

Pas seulement de ses pairs. Encore moins remplacer un certain Senna auprès des fans. Beaucoup de talent, compétiteur sans pareil, fou de la perfection et… froid, calculateur.

Un grand champion. Sans plus. Point final. Pour ceux qui l’ont suivi, constaté à leurs dépens son ambition démesurée, la vie continuera bien sans lui. Sentence donc : «Schumacher n’irradie pas de lueur mystique comme Ayrton Senna. Il n’a pas l’étoffe d’un héros à la Juan Manuel Fangio», écrit un spécialiste. Pour dire que son règne, au-delà qu’il a fait de lui le sportif le mieux payé au monde, ne lui a pas permis de supplanter d’autres champions dans le cœur des sportifs.

Dans son pays et dans le monde. Schumacher, et c’est les chiffres qui parlent, quitte sa petite planète dans la peau de celui qui aura exercé la plus écrasante domination de l’histoire de la F1. En est-il le plus grand ? Il restera de ce «mythe» vivant, de cet homme loin d’être un ange, l’étrange impression d’une carrière, d’un parcours incomparable ternis par une succession de coups tordus.

Celui qui ne se considère pas comme un héros mais conforté par des faits ne souffrant aucune contestation (un record de 90 succès, cinq titres consécutifs pour Ferrari et plus de points, de pole positions et de podiums que tous les autres pilotes de l’histoire), a marqué de son empreinte la fin du siècle dernier et le début du nouveau en alignant les records. On aime ou on n’aime pas…

Par Abdelaziz Azizi - La Tribune