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Actualité

 

Algérie : Damas, la dernière citadelle d'un Algérien

 

Tourisme AlgérieAlgérie - Depuis que les frontières algéro-marocaines ont été fermées pour les raisons que l’on connaît, la verte Tunisie du général Benali, qui s’apprête à boucler ses vingt ans de pouvoir, est devenue la destination de prédilection de nos compatriotes.

On parle de presque un million et demi d’estivants algériens tombés sous le charme des stations balnéaires de Sousse et Hammamet, où les Tunisiens se frottent les mains de l’afflux de plus en plus important de touristes d’un nouveau genre qui n’ont pas besoin de consulter le classement des pays à risque de la Coface pour effectuer ce genre de déplacement.

En Tunisie, on est presque chez soi. La plupart des Algériens y vont par route. Ceux qui n’ont pas la chance de posséder un véhicule ont le choix entre deux villes, Annaba et Constantine, pour rejoindre la capitale Tunis.

Là, ils sont pris en charge par ceux qu’on appelle ici « les fraudeurs », c’est-à-dire des chauffeurs qui effectuent la navette vers Tunis, à raison de 1.500 dinars par personne au départ de Constantine; pour Annaba, beaucoup plus proche des frontières tunisiennes, le tarif est de 1.200 dinars.

Un fraudeur est une vraie mine d’informations: il connaît le cours de toutes les monnaies, l’horaire de tous les vols en partance de l’aéroport de Carthage et sait vous dire en un clin d’oeil les sites à ne pas rater et les hôtels à éviter. Notre fraudeur ne déroge pas à la règle.

Tout le monde le connaît à Constantine. Il nous accueille avec un large sourire. Il me demande de prendre place dans un café climatisé, en attendant qu’il fasse le plein de clients. Il fait bon de se retrouver dans ce café avec la chaleur caniculaire du mois d’août. Le temps de prendre une boisson et voilà notre fraudeur qui m’informe que toutes les places ont été prises et qu’on va pouvoir enfin partir.

Je me retrouve avec Tarik, un jeune de Constantine, établi depuis 14 ans au Royaume-Uni, qui va prendre le vol de sept heures à destination de Londres. Il est presque 18 heures et Tarik, anxieux, n’arrête pas de regarder sa montre. Il regrette déjà le bled mais « que veux-tu ? », me lâche-t-il, « el-khoubza ». Les deux autres passagers sont des fonctionnaires de Aïn Sefra.

Abdeslam et Hamza ne rêvent que de se baigner à Sousse. Ils n’hésitent pas à bombarder notre fraudeur de questions, qui à son tour les tança vertement parce qu’ils ont échangé quelques billets d’euros sans prendre son avis d’expert.

Il leur explique qu’il fallait attendre de le faire en Tunisie pour éviter les tracasseries au poste frontalier et pour gagner quelques dinars tunisiens au change. Mais il fallait beaucoup plus pour entamer la bonne humeur de notre vaillant fraudeur.

D’après les calculs de notre guide et en passant par le poste frontalier de Oum Tboul, le trajet prendra 6 heures. Tarik pourra prendre son avion en toute tranquillité. Mais il n’est pas rassuré pour autant. « Il y a beaucoup d’affluence ces jours-ci et on pourrait être bloqué au poste, laisse-t-il tomber ». On essaie de détendre l’atmosphère en lui racontant les dernières blagues. Et on ne voit pas le temps passer lorsque le véhicule s’arrêta au village de Berrahal, près de Annaba, pour manger un morceau. On fait le ravitaillement d’eau et de tabac et on se retrouve finalement au poste frontalier d’Oum Tboul à minuit.

Là, contrairement aux appréhensions de Tarik, et malgré l’affluence de véhicules immatriculés à toutes les régions de l’Algérie, les formalités ont été effectuées en un temps record. Tarik, détendu, pouvait laisser échapper un très grand ouf de soulagement. On aperçut les lumières de la capitale tunisienne au bout de deux heures et demie de trajet.

Notre fraudeur nous déposa près d’un hôtel et emmena Tarik directement vers l’aéroport international de Tunis, non sans nous avoir offert ses services pour notre retour en Algérie. On enregistre ses coordonnées et on se quitte pour un autre jour.

Il se fait tard, la fatigue du trajet se fait terriblement sentir mais on n’arrive pas à se procurer un endroit pour dormir parce que tous les hôtels qu’on a visités affichent complet. On se débrouille enfin un établissement hôtelier douteux, crasseux même. Mais qu’à cela ne tienne, on ne pense qu’à se reposer.

Je n’ai pas le temps de fermer l’oeil que je suis obligé de parcourir le grand boulevard Bourguiba à la recherche d’une agence de voyage pour me procurer un billet à destination de Damas, raison de mon voyage en Tunisie. Il faut savoir que comme Tarik, beaucoup d’Algériens n’hésitent plus, pour des raisons évidentes d’économie, à prendre l’avion à partir de la Tunisie pour des destinations diverses.

A titre d’exemple, un billet en aller et retour d’Alger vers Damas sur la compagnie nationale Air Algérie coûte presque 45.000 dinars. Le même billet à partir de Tunis vaut 200 euros, c’est-à-dire moins de la moitié. Les trabendistes de l’Est algérien ont découvert le filon depuis longtemps. Plus bizarre encore, Moumène, un employé des assurances de la wilaya de Sétif, part à...

Casablanca en transitant par Tunis. Il m’explique que cette gymnastique est logique pour répondre à la stratégie illogique des tarifs effectués par Air Algérie. Avec cette politique des prix, si elle arrive à perdurer, il arrivera peut-être un jour où un Algérois en partance pour Oran transitera par... les îles Caïmans. Je récupère mes affaires à l’hôtel et je quitte mes compagnons de route d’Aïn Sefra qui ont profité pour faire la grasse matinée.

Je me retrouve juste après embarqué avec un vieux taxieur, fervent admirateur de Deriassa, qui me parla pendant un bon moment des vertus de la fraternité arabe et des atouts immenses de l’Algérie. J’ai eu largement le temps, avant d’embarquer pour Damas, de voir le nombre impressionnant de touristes européens dans l’aéroport international de Tunis. Je me suis rappelé une terrible sentence faite par une personnalité anglaise de passage en Algérie et que j’ai lue quelque part.

Cette haute personnalité trouvait que les Algériens font de très mauvais serveurs parce qu’ils possèdent ce « nif » légendaire. Avec la façon dont vous êtes apostrophés dans les bus, les cafés ou les restaurants, ce flegmatique british n’a pas vraiment tort.

Et quand vous voyez les prouesses de haute voltige faites par Marocains, Tunisiens et autres Syriens pour servir les clients, vous comprendrez pourquoi les Algériens rechignent à exploiter ce filon d’or qu’est le tourisme. Dans la salle d’embarquement, je rencontre une Algérienne établie à Baghdad depuis 1974.

Elle revient presque chaque année vers la terre de ses ancêtres; mais ce qu’elle n’arrive pas à comprendre est le cas de filles à peine pubères qui voyagent toutes seules. Elle m’explique qu’en Irak, à l’instar de la plupart des pays du Moyen-Orient, la femme ne peut voyager seule qu’à partir de 55 ans.

A ses paroles, je me remémore un certain statut des mineures à vie, de la moitié paralysée de la société et de la phraséologie rendue célèbre des pourfendeurs du code de « l’infamie ». Décidément, l’Irak, bien que pays frère, se trouve assez loin de la très moderniste Tunisie où le voile se fait très timide.

Une fois dans l’avion, une voix off nous apprend que le vol de nuit d’une durée de quatre heures survolera Malte, Larnaca, Beyrouth avant d’atterrir à Damas.

A l’écoute du nom de la capitale martyre libanaise, une foule d’images envahit mon esprit. Bien que la résolution 1701 eût mis fin à l’agression sioniste sur le Liban, les faucons israéliens continuent à imposer un blocus maritime et aérien injuste au pays du cèdre, un blocus que les Etats amis de Siniora, le Premier ministre libanais, Hariri et Joumblat, le leader druze, n’arrivent ou ne veulent pas desserrer.

On aperçut à peine Beyrouth et l’avion atterrit peu de temps après sur le tarmac de l’aéroport international de Damas, la plus ancienne capitale au monde, elle qui a vu passer les Cananéens, les Hittites, les Araméens, les Assyriens, les Perses, les Romains ou encore Alexandre le Grand, et qui se trouve actuellement par le jeu arabo-occidental dans l’oeil du cyclone.

Je montre mon passeport à un agent de la police des frontières qui se trouve très étonné. Il m’explique avec un large sourire que les Algériens arrivent à Damas sur toutes les compagnies aériennes sans exception, en provenance de toutes les capitales. Je lui explique à mon tour que les Algériens sont de grands voyageurs. Heureusement que des amis m’attendent, sinon j’aurai été arnaqué pour échanger les rares billets euros que j’avais sur moi, comme me l’avait expliqué un trabendiste marocain compagnon du vol.

Je n’ai même pas eu le temps de me reposer que je me retrouve dans les rues de Damas qui, contrairement à ce que je croyais, grouillent de touristes européens. Il ne fallait surtout pas rater l’immense bazar de la capitale où pratiquement tout se vend, de la petite babouche au luth professionnel syrien en passant par le légendaire narguilé.

On essaie de se frayer un chemin au milieu de la foule pour rejoindre la Grande Mosquée omméyade. A l’intérieur, on y visite la tombe de Saladin et celle du prophète Yahia, fils de Zacharie (qssl). On fait un tour-pèlerinage vers le cimetière de Ahl el-Bayt où sont notamment enterrés des membres proches de la famille du prophète Mohamed (qssl), son muezzin Bilal ainsi que ses épouses Oum Salama et Oum Habiba.

L’endroit est complètement envahi par les Iraniens. Direction mausolée de Sayyeda Rokaya, fille de l’imam Husseïn, imposant édifice bâti par les Iraniens, resplendissant dans son marbre, sa mosaïque, ses lustres et le légendaire tapis persan.

Le must de toute visite à Damas est le quartier populaire de Sayyeda Zaynab où est enterrée la petite-fille du prophète et qui tient une place de choix chez les musulmans chiites parce qu’elle a joué un grand rôle dans la tragédie de Karbala. Le mausolée, visible de loin grâce à son dôme doré qui n’a rien à envier aux autres places fortes du chiisme comme Karbala, Najaf ou Méched, a le mérite d’avoir donné vie à toute une ville.

En effet, vous pouvez trouvez l’Orient en miniature: les incontournables fakahani, el-Halawani vantant mille et une saveurs de l’Orient, les placettes où le narguilé est roi, les vendeurs à la criée, à la sauvette de curiosités. On se permet le luxe de vendre des serpents à côté des perruches, où les gens sont emportés par la fureur de la vie et où on doute fort qu’une guerre atroce toute proche vient de connaître la fin.

Sayyeda Zaynab brasse les nationalités visibles à leurs vêtements disparates, à la multitude d’établissements hôteliers qui ne désemplissent pas à longueur d’année.

Le nombre incroyable de savants chiites sur place, reconnaissables à leur tenue spécifique, s’explique par la présence de nombreuses Hawza ou écoles chiites qui ceinturent le mausolée et qui drainent les étudiants des quatre coins du globe. Mais cette année, et au milieu de toutes les photos et des stèles érigées à la gloire de la dynastie des Assad, Sayyed Nasrallah est omniprésent à telle enseigne qu’il commence à faire sérieusement de l’ombre à Hafez, Bassel et Bachar.

C’est dire que la Syrie a choisi de rester à côté de la résistance et de ne pas accepter de traiter en subalterne avec l’Etat sioniste, au risque de s’attirer les foudres des Etats-Unis.

Au moment où Baghdad est à feu et à sang grâce à la maestria américaine, Damas se fait assiéger par ses propres frères. Baghdad, Damas: toute une histoire, tout un symbole.

Je quitte Damas avec l’espoir de la voir toujours debout, grouillante de vie, carrefour des mondes comme elle l’a toujours été. Je me souviens qu’au milieu de ma précipitation de tout voir, j’ai oublié de rendre visite à la tombe du grand mystique musulman Ibn Arabi, qui mérite sûrement le détour.

Ça sera pour une autre fois. A l’aéroport de Damas et avant d’embarquer pour Tunis, je vois passer furtivement devant moi une jeune fille que j’ai vue quelque part. Sa silhouette ne m’était pas inconnue mais je n’arrivais à la reconnaître tout de suite.

Je m’assieds sur mon siège en prenant un journal tunisien. Je tombe sur un encart publicitaire concernant un concert que la chanteuse libanaise Hayfaa Wahby devait animer le jour même. Oui, c’était elle que j’ai vue passer tout à l’heure, elle qui a nargué plus d’un prince du Golfe. Elle va prendre le même vol vers Tunis. Elle a fini le deuil de la guerre que son pays a vécue.

Par Benekrouf Blaha, enseignant universitaire - Quotidien d'Oran

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